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Quand la France libérera-t-elle Georges Ibrahim Abdallah ?

31 Jan

Source : www.politis.fr

La libération de l’activiste libanais, emprisonné depuis 1984 pour complicité d’assassinat, est suspendue à une décision de Manuel Valls et bloquée par le parquet. Son dossier piétine depuis 1999.

Vingt-huit ans après son entrée en prison, Georges Ibrahim Abdallah est devenu l’un des plus anciens prisonniers politiques au monde. Ce Libanais de 61 ans a été condamné le 28 février 1987 à la réclusion à perpétuité pour complicité dans l’assassinat de deux diplomates israélien et américain en France en 1982.

Georges Ibrahim Abdallah en 1986 au tribunal de Lyon, derrière son avocat Jacques Vergès.

Georges Ibrahim Abdallah en 1986 au tribunal de Lyon, derrière son avocat Jacques Vergès.

AFP

À l’époque, aucune charge ne permet d’inculper l’ancien membre du Front populaire de libération de la Palestine pour ces meurtres. Mais le militant marxiste est identifié comme le chef de la Fraction armée révolutionnaire libanaise, qui revendique les homicides. Deux ans après les faits, Georges Ibrahim Abdallah était interpellé à Lyon avec un vrai-faux passeport et une perquisition permet de retrouver un pistolet qui aurait servi pour les assassinats.

Le ministère de l’Intérieur refuse de délivrer un arrêté d’expulsion

Depuis sa prison de Lannemezan (Hautes-Pyrénées), Georges Ibrahim Abdallah est aujourd’hui suspendu à une décision du ministère de l’Intérieur. Après 7 demandes infructueuses, il a obtenu en novembre 2012 un avis favorable à sa libration. Mais cette remise en liberté est conditionnée à son expulsion vers le Liban. Son sort est donc entre les mains du ministre de l’Intérieur.

 

Dernière minute

L’audience prévue ce lundi 28 janvier pour statuer sur la demande de libération conditionnelle de Georges Ibrahim Abdallah a été une nouvelle fois reportée, vendredi, en raison d’un appel du parquet, rapporte Europe 1 « de source judiciaire ». En attendant que cet appel soit examiné dans un délai légal de deux mois, le tribunal d’application des peines (TAP) ne pourra donc pas trancher comme prévu.

Le 14 janvier, le TAP avait ajourné sa décision au 28 janvier. C’est cet ajournement que conteste le parquet, estimant que le TAP aurait dû « déclarer la demande de libération conditionnelle de M. Abdallah irrecevable, compte tenu de l’absence d’arrêté d’expulsion, préalable indispensable à l’examen de cette demande ».

Or, la place Beauvau tarde à émettre le titre d’expulsion, forçant le tribunal d’application des peines (TAP) à « ajourner » sa décision. Après un premier report de deux mois, le TAP a donc dû à nouveau décider, le 14 janvier, d’un délai supplémentaire. Il devait finalement se prononcer lundi 28 janvier. Pendant ce temps, le parquet s’acharne à tenter de faire invalider la libération d’Abdallah, en multipliant les appels. Le TAP n’a ainsi pas pu trancher ce lundi 28 janvier. 

L’imbroglio juridico-administratif est total et les soutiens de l’ancien activiste s’impatientent. Abdallah est libérable depuis 1999, lorsque sa période de sûreté prenait fin. Il avait obtenu une première libération conditionnelle en 2003, finalement retoquée en appel en janvier 2004. Depuis, son dossier piétine.

« Cette injustice a assez duré  »

Devant l’enchevêtrement des procédures judiciaires, la colère est vive. Au Liban, à Ramallah et partout en France, de nombreux rassemblements ont été organisés depuis deux semaines pour dénoncer une« vengeance politique » de la France contre ce militant pro-palestinien. Avec une tension certaine autour des centres culturels français au Liban, l’affaire – résolument politique – grossit.

 

Mali, Afghanistan, les leçons oubliées

14 Jan

Source : Alain Gresh , Nouvelles d’Orient

Une nouvelle fois, un consensus politique se dessine autour de l’intervention militaire française au Mali. Le Parti socialiste comme l’UMP et le Front national soutiennent l’initiative du chef de l’Etat. Seules quelques voix discordantes se font entendre, au Parti communiste (« L’intervention militaire française comporte de grands risques de guerre », PCF, 12 janvier) ou au Parti de gauche. L’ancien premier ministre Dominique de Villepin, dans une tribune auJournal du dimanche (« Villepin : “Non, la guerre ce n’est pas la France” », 13 janvier), s’inquiète également :

« Ne cédons pas au réflexe de la guerre pour la guerre. L’unanimisme des va-t-en guerre, la précipitation apparente, le déjà-vu des arguments de la “guerre contre le terrorisme” m’inquiètent. Ce n’est pas la France. Tirons les leçons de la décennie des guerres perdues, en Afghanistan, en Irak, en Libye.

Jamais ces guerres n’ont bâti un Etat solide et démocratique. Au contraire, elles favorisent les séparatismes, les Etats faillis, la loi d’airain des milices armées.

Jamais ces guerres n’ont permis de venir à bout de terroristes essaimant dans la région. Au contraire, elles légitiment les plus radicaux. »

Il est ironique de noter que cette intervention a commencé au moment où la France se retire d’Afghanistan (Lire « Fin de mission en Afghanistan », Défense en ligne, 19 décembre 2012) et où le président Hamid Karzaï se trouvait à Washington pour discuter du retrait total (ou presque) des forces américaines. Est-ce sur un succès que ces troupes se retirent d’Afghanistan ? « Mission accomplie » ?

Rien n’est moins sûr.

Le pouvoir qui s’est installé à Kaboul, dans les fourgons des armées étrangères, est dirigé par Karzaï, dont il faut rappeler qu’il n’a gagné l’élection présidentielle de septembre 2009 que grâce à des fraudes massives ; sa légitimité ne dépasse pas celle de son clan, de ses affidés, profondément corrompus. Ce sont des dizaines de milliards de dollars d’aide internationale qui ont disparu dans les poches sans fond des responsables politiques. Sans parler du fait qu’une part importante de cette aide « retourne » aux pays donateurs, comme le remarque Oxfam-France :

« L’aide internationale à l’Afghanistan est relativement significative en volume, mais elle reste largement inefficace : presque 40 % des montants versés depuis 2001 sont retournés aux pays donateurs sous la forme de profits ou de rémunérations. De plus une large part de l’aide ne parvient pas aux Afghans les plus pauvres. »

Et, du point de vue social, la situation reste terrible, marquée par une guerre qui n’en finit pas. Toujours selon Oxfam :

« Si quelques progrès ont été enregistrés en matière de santé et d’éducation dans les années qui ont suivi la chute des talibans, les défis à relever dans ces secteurs restent écrasants : actuellement un enfant sur cinq meurt avant l’âge de cinq ans, une femme sur huit meurt de complications liées à la grossesse ; deux millions d’enfants, dont deux tiers sont des filles, ne sont pas scolarisés. On estime actuellement que près de la moitié de la population afghane vit toujours en dessous du seuil de pauvreté, tandis que plus de la moitié des enfants souffre de malnutrition chronique. »

Qui peut croire que la guerre amène une amélioration de la situation des populations ?

Le plus paradoxal est que le seul progrès représenté par la scolarisation plus importante des filles reste menacé : les seules chances de l’administration actuelle afghane de ne pas être éliminée après le départ des troupes de l’OTAN est de négocier avec les talibans. Et, comme le remarquent les responsables d’Oxfam, ce sont les femmes qui risquent d’être les victimes de cette réconciliation. Quoiqu’il en soit, il est faux de croire que la libération des femmes peut être imposée par les baïonnettes des armées étrangères (lire Christine Delphy, « Une guerre pour les femmes ? », Le Monde diplomatique,mars 2002). Le colonialisme aussi prétendait « libérer » les femmes musulmanes.

Mais les interventions en Afghanistan (puis en Irak) ont eu bien d’autres conséquences régionales et internationales dont on paie encore le prix. La guerre s’est étendue au Pakistan, où les talibans locaux se sont renforcés au détriment d’un pouvoir central affaibli. Et l’utilisation massive des drones par l’administration Obama pour éliminer des « terroristes » — avec de nombreuses victimes « collatérales » —, alimente les haines anti-occidentales.

Ces expéditions militaires menées au nom d’une guerre sans fin contre le terrorisme ont eu pour effet paradoxal de renforcer ces organisations que l’Occident affirmait vouloir détruire. Il s’est créé, en réponse aux interventions multiples, « une autoroute de l’internationale insurgée », du Pakistan au Sahel, en passant par l’Irak, la Somalie : par elle circulent les combattants, les idées, les techniques de combats, les armes de tous ceux qui veulent lutter contre « les nouveaux croisés ». Des combattants irakiens se sont formés en Afghanistan, tandis que des Maghrébins ont pu acquérir en Irak une compétence militaire incontestable. La guerre contre le terrorisme a facilité l’unification de groupes très divers sous le drapeau d’Al-Qaida. Et, sans doute, Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) n’aurait jamais pris cette dimension sans l’intervention en Afghanistan. Et aussi, rappelons-le, sans la guerre en Libye qui a « libéré » des arsenaux militaires considérables et de nombreux combattants enrôlés (et contrôlés) par Kadhafi. Peut-on s’étonner que de nombreux musulmans voient dans ces interventions une croisade contre l’islam ? Toutes, depuis 2001, ont eu lieu dans des pays musulmans — Afghanistan, Irak, Somalie, Liban, Mali, sans oublier les guerres menées à Gaza. Et au moment où l’islamophobie fait des ravages dans les sociétés occidentales.

Combien de fois nous a-t-on expliqué qu’il n’y avait pas le choix, que « nous » défendions en Afghanistan la sécurité de l’Occident : si « nous » étions battus là-bas, les combats se déplaceraient demain dans nos banlieues. Et pourtant « nous » allons partir d’Afghanistan comme si de rien n’était, sans avoir stabilisé la situation, sans même parler de démocratie. Et personne ne prétend que les conséquences en Europe seront catastrophiques. On peut remarquer, au contraire, que chacune de ces expéditions coloniales aboutit à plus d’insécurité, plus de contrôles, plus de surveillance et, par là même, à une atteinte aux libertés fondamentales.

Pourtant, c’est le même argument qui est repris pour le Mali : éviter que s’installe à nos frontières un foyer terroriste, un Sahelistan (lire, dans Le Monde diplomatique de janvier, le reportage de Philippe Leymarie). Et la première décision du gouvernement français au lendemain de l’engagement au Mali est de renforcer le plan Vigipirate ! N’est-ce pas parce que nos gouvernants savent que ce type d’intervention alimente le terrorisme, qu’elle ne l’affaiblit pas ?

Douze ans après, l’intervention occidentale en Afghanistan est un fiasco. Celle en Irak a abouti à la déstabilisation durable du pays (et à une implantation de groupes liés à Al-Qaida qui n’y étaient pas présents avant 2003). D’ici douze ans, quel bilan dressera-t-on de l’engagement de la France au Mali?

France-Palestine : la volte-face de François Hollande

5 Nov

Triomphe sur toute la ligne pour Benjamin Netanyahou : lors de sa visite en France, il a obtenu du président français un alignement inédit sur la position israélienne dans le dossier israélo-palestinien. Et la trahison de ses engagements de campagne sur la reconnaissance internationale de la Palestine.

Si les dirigeants palestiniens attendaient de François Hollande un soutien plus concret que celui apporté à leur cause par Nicolas Sarkozy, ils ont dû être cruellement déçus au lendemain de la visite à Paris de Benjamin Netanyahou. Sur deux points cruciaux aux yeux des Palestiniens – le gel de la colonisation et la reconnaissance internationale de la Palestine  -, le président français a tenu des propos qui ont visiblement plu au premier ministre israélien et qui ont provoqué désillusion et amertume à Ramallah. Voici pourquoi.

Le gel de la colonisation

Contrairement à ce qu’affirment les dirigeants israéliens, il ne s’agit pas là d’une exigence nouvelle, propre aux Palestiniens et destinée à masquer leur refus de négocier. L’arrêt de la colonisation n’était pas mentionné dans la « Déclaration de principe » de 1993 (le règlement de la question des colonies était renvoyé aux conversations sur le statut final) mais constituait l’une des recommandations du rapport Mitchell, rendu public en mai 2001.

Ce document préconisait en fait un « gel de l’extension des colonies juives de peuplement » et recommandait parallèlement l’incarcération des terroristes palestiniens. Le tout devant contribuer à la « restauration de la confiance » entre les deux parties. Le gel de la colonisation constitue surtout l’une des revendications essentielles de la Feuille de route, présentée en avril 2003 par le Quartette (Etats-Unis, Nations unies, Russie, Union européenne) et toujours en vigueur. Il est aussi l’une des recommandations constantes de l’Union européenne, rappelée à de multiples reprise depuis dix ans. Il est en effet tenu pour indispensable à la mise en place d’une solution à deux Etats.

281.000 colons en 1993, 550.000 aujourd’hui

Si les Palestiniens en ont fait une condition à la reprise des négociations avec Israël, c’est que depuis 1993, les colonies n’ont cessé de se multiplier et de s’étendre en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Tous les gouvernements israéliens qui se sont succédés depuis la signature des accords d’Oslo ont poursuivi – toutes étiquettes politiques confondues – cette politique de colonisation. Evalué à 281.000 en 1993, le nombre de colons israéliens en Cisjordanie et à Jérusalem-Est dépasse aujourd’hui 550.000. Et cette expansion des colonies, accompagnée d’un accroissement parallèle des réserves foncières et d’un développement du réseau routier, a transformé la Cisjordanie en un archipel de mini-cantons palestiniens séparés par des routes ou des zones sous contrôle israélien.

Illégale au regard du droit international, jugée « illégitime » par Barack Obama dans son discours du Caire, critiquée auparavant par la secrétaire d’Etat de George Bush, Condoleezza Rice, la colonisation est aujourd’hui considérée par nombre de chancelleries comme l’un des principaux obstacles à la création d’un etat palestinien viable. Son caractère illégal est régulièrement rappelé par l’Union européenne.

Officiellement, le gouvernement israélien s’est engagé à en geler le développement lors de la conférence d’Annapolis en 2007. Il a ensuite proclamé, en novembre 2009, un moratoire limité sur les « nouvelles constructions ». Ce qui n’a pas empêché la population israélienne des colonies de s’accroître – selon le Bureau israélien des statistiques, de 65.000 personnes entre 2007 et aujourd’hui.

 

La multiplication des faits accomplis

Parallèlement, la construction du mur et de la barrière de séparation qui annexent de fait les plus grands blocs de colonies et l’écrasante majorité des colons au territoire israélien ont confirmé que la poursuite et le développement de la colonisation constituent pour le gouvernement israélien un choix stratégique majeur.

C’est encore plus vrai depuis l’arrivée au pouvoir de Benjamin Netanyahou qui s’appuie, à la Knesset, sur la majorité la plus à droite de toute l’histoire d’Israël. Une majorité nationaliste et conservatrice au sein de laquelle les colons et leurs partisans pèsent d’un poids décisif. Et l’accord récemment conclu entre Netanyahou et son ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman, pour rapprocher leurs deux formations en vue des élections législatives de janvier, vient de déplacer encore plus vers l’extrême-droite le centre de gravité de la coalition gouvernementale israélienne.

Fort de ce soutien intérieur et de la passivité – voire de la connivence – de ses interlocuteurs étrangers, le gouvernement israélien peut multiplier impunément les faits accomplis et les déclarations provocatrices, comme il l’a fait en annonçant, pendant la visite du vice-président américain Joe Biden à Jérusalem, en mars 2010, la construction de 1.600 logements à Jérusalem-Est. Ou comme il vient de le faire en annonçant la construction de 1500 nouveaux logements à Jérusalem-Est, quelques jours avant la visite de Benjamin Netanyahou à Paris.

 

Le soutien de l’Union européenne aux colonies

Sur la question de la colonisation, François Hollande a admis qu’il avait des « divergences » avec Netanyahou, car il souhaitait « la voir arrêtée ». Mais il n’a pas relevé que la poursuite de la colonisation mettait en péril la solution à deux Etats qu’en principe, la France continue de préconiser et de soutenir pour résoudre la question palestinienne. Il n’a pas rappelé non plus à son interlocuteur israélien que la colonisation viole le droit international et se poursuit en contradiction avec des engagements souscrits par le gouvernement israélien.

Le silence de François Hollande sur cette question est d’autant plus assourdissant qu’il coïncide avec la publication du rapport accablant de 22 ONG occidentales présentes et actives dans les territoires occupés. Préfacé par l’ancien commissaire européen aux Relations extérieures, Hans van den Broek, ce document de 20 pages établit que l’Union européenne importe massivement depuis près de 20 ans des marchandises – produits agricoles et industriels – estampillées « Made in Israël » mais provenant des colonies israéliennes.

En agissant ainsi, l’UE apporte son soutien aux colonies israéliennes et facilite leur développement. Elle contribue ainsi à une stratégie qui permet au gouvernement israélien de contrôler – à travers les colonies – près de 40% du territoire d’un potentiel Etat palestinien. Elle renforce, à sa façon, une présence israélienne qui empêche la reprise de négociations entre les deux parties.

 

La reconnaissance internationale de la Palestine

Si les dirigeants palestiniens ont tenté en vain, l’année dernière, et vont tenter de nouveau dans quelques semaines, d’obtenir, devant l’Assemblée générale des Nations unies, l’admission de la Palestine comme « Etat non-membre », ce n’est pas dans le but de remporter un succès diplomatique d’ailleurs symbolique et de peu de poids, face aux attentes concrètes et de plus en plus impatientes de leur peuple.

Cette stratégie avait pour objectif de sortir de l’impasse dans laquelle les négociations israélo-palestiniennes directes, avec ou sans médiation ou parrainage des Etats-Unis, ont enfermé le processus de paix. Placés devant le fait accompli territorial de la colonisation et de la construction de la barrière de séparation, mais aussi confrontés aux réticences de Washington, à l’impuissance de l’Union européenne et à la duplicité des pays arabes, les négociateurs palestiniens ont fini par accepter l’idée qu’ils n’avaient plus qu’une option, puisque la lutte armée demeure exclue : en finir avec les face-à-face à huis clos, les négociations secrètes et ouvrir le dossier israélo-palestinien devant le forum des nations. En commençant par obtenir leur admission aux Nations unies.

 

« Je soutiendrai la reconnaissance internationale… »

Dans son programme pour l’élection présidentielle, « Le changement, c’est maintenant », François Hollande semblait avoir mesuré l’urgence d’une reprise du dialogue et compris l’importance, pour les Palestiniens, de cette reconnaissance internationale. « Je prendrai », lisait-on dans la proposition n°59, « des initiatives pour favoriser, par de nouvelles négociations, la paix et la sécurité entre Israël et la Palestine. Je soutiendrai la reconnaissance internationale de l’Etat palestinien ».

En juin 2011, le PS avait publié une déclaration appelant « la France et l’Europe à reconnaître l’Etat palestinien pour avancer vers la paix et la réconciliation entre les peuples israélien et palestinien ». « La communauté internationale », précisait le document, « doit convoquer au plus tôt une conférence de paix sur le Proche-Orient afin de fixer les paramètres de l’accord de paix israélo-palestinien et les engagements de la communauté internationale en matière de sécurité, d’aide économique et de coopération avec la région. » En clair, le parti du candidat François Hollande prenait ses distances avec la position israélienne, qui repose sur la reprise des négociations bilatérales sans conditions.

Quelques mois de pouvoir plus tard, c’est un tout autre langage que le président français tenait devant le premier ministre israélien. « La France », a déclaré la semaine dernière François Hollande lors de la conférence de presse commune avec Benjamin Netanyahou, « souhaite la reprise – sans condition – des négociations entre Israéliens et Palestiniens. Avec le même objectif, celui que nous poursuivons depuis des années, pour ne pas dire depuis des décennies, c’est-à-dire deux Etats : l’Etat d’Israël avec la sécurité qui doit lui être garantie et l’Etat palestinien qui doit pouvoir vivre. […] Je sais qu’il y a des élections dans quelques semaines en Israël. Il y a aussi la tentation pour l’Autorité palestinienne d’aller chercher, à l’Assemblée générale des Nations unies ce qu’elle n’obtient pas dans la négociation. Seule la négociation pourra déboucher sur une solution définitive à la situation de la Palestine. »

 

Occasions manquées

Oublié, comme on voit,  l’engagement de soutenir « la reconnaissance internationale de l’Etat palestinien ». Oubliée la nécessité de « fixer les paramètres de l’accord de paix ». Sur ces deux points, le président français colle désormais à la politique israélienne.

François Hollande avait pourtant l’occasion, en recevant le premier ministre israélien, de faire entendre une voix divergente dans le consensus complice des capitales européennes. Il avait aussi l’occasion de dire à Benjamin Netanyahou, surtout après leur visite commune à Toulouse, que l’attachement de la France à la protection des juifs de France et à la sécurité d’Israël lui donnait le droit d’attendre d’Israël un respect scrupuleux du droit international, des résolutions des Nations unies et des accords conclus par les gouvernements précédents. Il n’a pas su saisir ces occasions. Serait-il, selon la formule appliquée autrefois à Yasser Arafat par un ministre des Affaires étrangères israélien l’un de ces hommes « qui ne ratent jamais une occasion de rater une occasion » ?

René Backman, journaliste au Nouvel Obs

source http://renebackmann.blogs.nouvelobs.com/